Ce jeudi, la chanteuse Loah offrait son « artsoul » à la Chapelle du Centre culturel irlandais. Une ambiance de club de jazz grâce à la songwriter, qui fait le grand écart entre l’Irlande et la Sierra Leone.

« Artsoul » : l’adjectif inventé par Loah, Sallay Matu Garnett dans le civil, pour qualifier sa musique. Soit un mélange de jazz, de folk et de soul, qui fait un bien fou aux oreilles, et osons le dire, élève l’âme. La jeune femme, née au Kenya et qui a grandi entre Maynooth, la Gambie et la Sierra-Leone, faisait une halte à la Chapelle du centre culturel irlandais ce jeudi (la dernière Chapel session de l’année). Son premier concert à l’international pour celle qui est devenue un petit phénomène en son pays.
Sur son CV figurent une participation sur l’album Soisín de Kila et celui du Discovery Gospel Choir. Elle a surtout contribué à sa façon au succès de Hozier en écrivant avec lui, le titre Someone new. Ce morceau poppy n’a pas grand chose à voir avec ce qu’on va entendre ce jeudi. Elle nous attrape d’emblée avec le bouleversant The Bailey, où le son des cordes (un violoncelle en l’occurrence) va crescendo. Un morceau entre soul et musique classique qui donne le frisson. Alternant l’anglais et un français quasi parfait, elle nous présente I will cry, un essai folk euphorisant bien qu’on y raconte « un amour brisé, bref le truc habituel ».

Un peu plus tard, on a droit à une reprise, minimaliste (violoncelle et voix), de Anchor Song de Björk. « Cela parle d’ océan, qui fait partie de nous ». Une relecture assez magique, qu’on préfère presque à l’original. Puis vient Cortège, hymne au courage des femmes et des mères : « qui ont une énergie pas assez appréciée dans ce monde ». Un air africanisant et céleste avec des paroles en sherbro et mendé, le dialecte de la Sierra-Leone. Entre-temps, elle nous berce de son jazz doux et chaud comme cette reprise de Infant Eyes de Wayne Shorter. On aime également le funky Cross, où le chant de Loah parcourt toute la gamme. Grand écart musical encore avec Unto Us Is Born A Son, une très belle et émouvante chanson de Noël du XVIe siècle.
Avec Morning, son morceau le plus pop, mes voisines, fascinées jusque là, commencent à bouger leur corps tandis qu’une « audacieuse » se met franchement à danser sur la groovy Nothing. A l’heure du rappel, la multi-intrumentiste s’empare d’une guitare pour nous révéler Unveiled, son hommage à la culture malienne (elle voue un passion pour la chanteuse Omou Sangaré). Cette chanson lui a été inspirée par le film Timbuktu de Abderrahmane Sissako, qui montre le pays sous le joug des extrêmistes religieux. Elle devrait figurer sur un premier EP promis pour 2016. En attendant, l’artiste équilibriste nous a embarqué ce jeudi, très loin de l’île d’Emeraude pour l’Afrique de l’ouest. Et on a fait le voyage avec délice.