Le 5 décembre dernier, Saint Sister faisait une halte au Pop Up du Label, en compagnie du songwriter folk Ciaran Lavery. Le duo d’atmosfolk nord-irlandais a déroulé son premier album, l’une des pépites de 2018. On vous raconte. (Photos : Lisa Ritaine)
On l’a déjà écrit dans d’autres live report le concernant : entre Ciaran Lavery et les reprises, c’est une grande histoire d’amour. Le songwriter le prouve à nouveau lorsqu’il ouvre pour Saint Sister en ce 5 décembre au Pop up du Label. Tout seul avec sa guitare, sa voix puissante et pleine de graviers fait honneur à Smile, un morceau dont la musique est signée Charlie Chaplin et entendu à la fin des Temps modernes. Et puis dans un genre bien différent, on s’aperçoit que Bloodbuzz Ohio, chanson phare et post punk de The National supporte très bien une transformation folk. Le prolifique musicien nord-irlandais, de retour au Pop up du label un peu plus d’un an plus tard, parle enfance et famille avec le mélancolique Train et nous subjugue avec un Let bad in chanté à cappella. Il se marre de la tristesse de ses chansons. Un nouvel exemple ? « Love is like a suicide » dit-il dans 13, extraite de Sweet Decay, son nouvel opus sorti en avril dernier. On espère un autre rendez-vous, et très vite, pour en découvrir davantage.
La forme du silence
De son côté, Saint Sister a bien l’intention de faire la fête, à Shape of Silence, son premier album, tout nouveau, tout beau, dans les bacs depuis octobre 2018. Son concert mémorable à l’Olympia Theatre nous avait laissée bouché bée (voir ici). A Dublin, le duo était accompagné par des musiciens, le rappeur Jafaris et la dJ producteur Kormac pour un ébouriffant Causing Trouble : on a droit cette fois à une version plus « légère » et plus « sobre » mais le bonheur pour les oreilles reste identique. L’atmosfolk, mélange de folk sixties, sons électro, harpe et harmonies vocales, de Gemma Doherty et Morgan McIntyre envoûte d’entrée avec Tin Man, chanson d’amour d’après le fameux personnage du Magicien d’Oz. Gemma Doherty frappe sur sa harpe, sample le son produit pour Twin Peaks, hommage évident à l’oeuvre de David Lynch. Les harmonies vocales envoûtent sur Madrid, disponible sur un premier EP eponyme.
Dancing in the dark
Comme leur compatriote Ciaran Lavery, les deux jeunes femmes, se débrouillent pas mal dans l’exercice de la reprise. On a droit à une relecture épurée et tout en mélancolie de Dancing in the dark, de « môssieur » Bruce Springsteen. On donne de la voix dans la salle pour Corpses, qui apparemment est devenu un hit. A l’applaudimètre, Versions of hate recolte pas mal de suffrages. On a un gros faible pour Tir Eile (un autre pays), chanté quasi a cappella (à l’exception de l’harmonium, aux mains de Gemma Doherty). On enchaîne avec Steady et donc Causing Trouble déjà cité, deux singles redoutables et planant à la Daughter, qui laissent parler les sons electro. On retrouve le calme notamment avec The Mater, certainement l’un des titres les plus émouvants et aboutis de l’album.
Et Ciaran revient sur scène
Le duo devient trio quand Lavery vient jouer son Morning Bell, qui figure sur la tracklist de son dernier né. « Do you ever feel like Jesus Christ ? / Cause you’re holding yourself like you’re bound to leave this life/ I feel like a motor car with nowhere to go/ Time is just a cigarette and my life is smoke ». Ok, ce n’est pas d’une gaïté folle mais le mélange assez évident des voix nous réconcilie avec la vie (si, si). On s’offre Castles où là, encore Gemma nous régale de son jeu de harpe et de beats créés en frappant sur son instrument. Un instrument qu’elle laissera parler, en quittant la scène après Morgan. Des faux au-revoir évidemment. En guise de rappel, elles rendent à nouveau hommage à la regrettée Dolores O’Riordan, la chanteuse des Cranberries avec une cover délicate et qui met les poils de Dreams. Dans la salle (pas mal d’Irlandais), on jubile : trésor national… Un statut – on fait les paris – que Saint Sister pourrait bien atteindre un jour prochain.