Le 17 avril, c’était « ambiance boisée » au Centre Culturel irlandais. Grâce à David Keenan, au folk rageur, et Lemoncello qui ont livré une inspirante Chapel Session. Photos de Caroline Vandekerckhove.
Ce soir, nous sommes entre amis. Lemoncello ouvre pour David Keenan en ce 17 avril au Centre culturel irlandais. Le duo folk, qui fait partie de la « tribe » du songwriter, a notamment partagé la scène avec ce dernier lors de concerts mémorables au Whelan’s en janvier dernier (voir ici). Laura Quirke (guitare) et Claire Kinsella (violoncelle) ont elles-mêmes sorti un Ep qu’elles vont naturellement dérouler dans la chapelle du CCI. Leur folk se fait délicat, intemporel, entre americana et tradition irlandaise.
Le mariage violoncelle – guitare – harmonies vocales (volutes celtisantes) invitent à la rêverie. On frissonne joliment. Notamment avec Mantelpiece ou Morning. Les dimanches d’ennui à Saint Quentin, dans le nord de la France, a inspiré à Laura Quirke, le très beau Sunday Strollers. Avec sa partenaire, la jeune femme, qui a étudié le français, « ose » une relecture de Quand reviendras-tu ?. de Barbara. Exercice risqué pour tout anglo-saxon (l’accent…) mais parfaitement maîtrisé par le duo.
« J’adore la chanson française. C’est plus poétique que l’anglais… Les Irlandais se défendent pas mal ! » s’amuse Laura qui cite Brel, parmi ses auteurs préférés. On ne va pas la contredire. On se quitte, pas pour longtemps, avec Stuck Upon the Staircase, la chanson-titre de l’EP. Une petite pépite, à la fois mélodique et de songwriting. Lemoncello fait partie de nos artistes à suivre depuis un moment (voir notre interview) : après ce concert, notre fan attitude est montée d’un cran…
Mais voilà, David Keenan, qui nous demande de « laisser nos peurs à la porte». Après quelques EP (dont Evidence of Living en collaboration avec le songwriter Junior Brother, le fiddler Gareth Quinn Redmond et … Lemoncello), son premier album très attendu sera bientôt dans les bacs. En son pays, David Keenan fait déjà beaucoup parler de lui. Et à raison : car dans cette terre de bardes, le songwriter, nourri aux poètes irlandais et qui met un point d’honneur à garder son accent quand il chante, défend un folk rageur et lettré.
Il suit une certaine tradition, avec une fougue qui lui est propre. Le résultat, sans doute, d’un apprentissage par le « busking » (jouer dans la rue). Le public de la chapelle est mis à contribution d’entrée avec Lawrence of Arcadia. « I am calling all the bards in /To illuminate us now /And if I lean towards the trigger you say / »You can’t kill a killer, no / No you can’t kill a killer, no”. Tel un poète maudit, Keenan aime le pouvoir des mots et ne fait pas mine de s’en servir. Même qualité d’écriture pour Keep the peace, prepare for war et sa « chanson de noël », Postcards From Catalonia. Dans The Origin of the World, il s’inspire du fameux et « scandaleux » tableau de Courbet ainsi que de la déesse Diane transformant Actéon en cerf, après qu’il l’a surprise prenant son bain : l’art et les lettres, encore et toujours…
Laura Quirke et Claire Kinsella viennent le rejoindre sur scène pour trois titres, temps forts d’un concert déjà validé. C’est un festival d’harmonies vocales avec Two Kids (morceau filmé par Myles O’Reilly). Bless The Mad Ones, dédié aux « fous de la salle », fait dans l’hymne et le cri de ralliement. Belle efficacité avec One More Tune, refrain qu’on ne peut s’empêcher de reprendre. Une fois Lemoncello parti, Keenan fait la fête à James Dean : il imagine la star fuyant la célébrité et travaillant pour… Irish Rail (La SNCF irlandaise). Pour cette chanson, Keenan rend hommage à ce poissard de Samuel Beckett, poignardé par un maquereau à Paris. Décidément, ce garçon est un ovni…
On parle des maux de Dublin dans Subliminal Dublinia, écrite à… Los Angeles. « Occupy the City with Original Ideas » dit la chanson : on adhère à la vision d’un jeune homme à la passion communicative. On se dit au revoir en citant Yeats avec la toute nouvelle The Corner’s Boy lament. Ce fut beau et intense : on espère des retrouvailles aussi riches quand David Keenan sera prochainement résident au Centre culturel irlandais. On ne doute pas que la Ville lumière et ses poètes sauront l’inspirer…
Un commentaire Ajoutez le vôtre